vendredi 23 mars 2012

Un soutien d'importance

J'ai rencontré hier des responsables de l'Association "SOS Education" qui ont trouvé mon projet intéressant. Nous avons découvert que nous partagions les mêmes idées sur l'école et notre système scolaire: moment bien sympathique et constructif puisque cette association m'offre son soutien  et va parler de mon projet et de moi-même sur son blog. Nous allons nous revoir bientôt. J'ai parlé de mon expérience d'institutrice, d'abord de mon passage à l'IUFM des Hauts-de-Seine où j'ai découvert un univers complètement déconnecté de la réalité de l'enfant et marchant un peu sur la tête,  de ce que j'ai vu dans les écoles où j'ai effectué des remplacements, souvent écoles de ZEP, et de mon expérience passionnante du CP.
   Quand j'ai pris ma classe de CP j'étais vraiment mûre pour faire tout autre chose que ce que j'avais vu.
    J'ai découvert à l'IUFM les méthodes insensées actuelles. Tout le monde peut être d'accord pour dire que lire, c'est comprendre. Mais c'est à partir de cette définition que des pédagogues ont éléboré la méthode d'apprentissage la plus utilisée actuellement et qui est basée sur la recherche du sens: l'enfant doit être amené et encouragé à chercher et trouver le sens du texte qu'il a sous les yeux; comme il ne sait pas lire il devine avec les mots qu'il connaît. Dès la maternelle on aide l'enfant à constituer son stock de mots, mots courants et mots-outils, puis il doit trouver des indices, il fait des hypothèses sur le sens. L'enfant doit aller droit au sens sans déchiffrer, il doit lire directement comme l'adulte, c'est une phrase que j'ai entendu répéter souvent. Moi, je n'ai pas compris et je mettais en garde mes collègues-élèves.
    Mon premier stage, à l'IUFM, s'est déroulé en CP en janvier et je me rappelle ma stupéfaction en découvrant concrètement comment on apprenant à lire aux enfants: après une lecture silencieuse, les enfants qui avaient deviné les nouveaux mots venaient les murmurer à l'oreille de la maîtresse, puis ces enfants commençaient à lire à voix haute, les autres essayaient de suivre le doigt sur n'importe quel mot, n'importe quelle ligne, sans pouvoir s'appuyer sur des lettres ou des sons qu'ils ne connaissaient pas.C'est dans cette classe que j'ai pensé un jour que s'il y avait un problème dans l'apprentissage de la lecture, j'en avais un exemple sous les yeux, il m'a semblé que j'étais dans la situation d'un biologiste qui découvre un virus qu'il ne cherchait pas.
   Mais le"clou" ça a été la démonstration du professeur. Un professeur venait me voir pendant mon stage et un jour, c'était une femme, elle m'a montré comment faire lire un enfant qui apprend à lire.Il faut d'abord trouver un livre dont les illustrations soient bien fidèles au texte et puissent aider l'enfant à en découvrir le sens. Le professeur montrait le dessin du lapin et le mot "lapin" et l'enfant disait "lapin". A l'aide des mots qu'il avait mémorisés, il pouvait lire le titre "le petit lapin noir" puis on entrait dans l'histoire, l'enfant lisait les mots qu'il reconnaissait, en devinait d'autres à l'aide des illustrations et le professeur lui donnait les mots qu'il ne trouvait pas. Voilà comment on apprend à lire en lisant, c'est un peu long mais l'enfant fait l'expérience que lire, c'est comprendre. On lit mieux un mot dans une phrase qu'un mot isolé, il faut donc mettre d'emblée l'enfant devant une phrase ou un texte et il faut bien 8 ans pour apprendre à lire!
  Cela se passait au début des années 90, mais on voit toujours dans presque toutes les classes les enfants commencer à apprendre à lire dans un texte qu'ils lisent par coeur et dont ils finissent par reconnaître et retenir quelques mots.
   Quand on fait des remplacements on ne peut pas changer de méthode, j'ai donc été obligée d'employer la méthode globale ou semi-globale. J'avais pu observer la maîtresse avant de la remplacer: la séance commençait par la lecture silencieuse d'un texte puis la maîtresse posait des questions; les enfants répondaient n'importe quoi et pour obtenir des réponses satisfaisantes la maîtresse se surpassait, elle arrivait à induire les réponses, une véritable accoucheuse de sens. Cet exercice était difficile et très long pour un bénéfice bien léger, je comprenais pourquoi dans le cahier des enfants il n'y avait que 2 ou 3 lignes d'écriture tous les 2 jours.
   Le temps a passé mais je vois bien que la méthode, avec des variantes, est toujours la même et que les enfants ont du mal. Sans l'aide de la méthode Boscher utilisée par de nombreux parents désemparés et conscients du problème, la situation serait encore plus catastrophique.
   C'est tout de même incompréhensible que personne ne s'interroge ouvertement sur la méthode, il y a des années qu'on attend une mise en cause des méthodes. J'ai pris un CP parce que j'étais lasse d'attendre, j'ai expérimenté avec bonheur la méthode alphabétique, bonheur des enfants, bonheur de l'enseignant et soulagement des parents. Et maintenant, en retraite, je ne supporte plus de voir que ça continue. Cela me révolte, et plus encore, le silence qui accompagne cette souffrance des élèves et l'inquiétude de leurs parents qui n'osent rien dire et se rassurent en sachant que beaucoup d'enfants sont logés à la même enseigne.
   
  

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